Who – Qui suis-je ?
Avec des parents photographes et graphiste, dès la naissance j’ai été plongée dans le monde de l’image. Mon premier appareil photo était un Polaroïd. Avec cet appareil, je photographiais des Barbies mises en scène et mes petits camarades de la maternelle.
Néanmoins, dans une famille d’artistes, il est parfois difficile de faire sa place. Alors, très vite j’ai troqué les crayons et la peinture, le noir et blanc des tirages argentiques et la pratique, pour les bancs universitaires, l’Histoire de l’Art, ses concepts et ses théories. Mais en parallèle, j’ai toujours fait des autoportraits photographiques.
Assez naïvement, à 14-15 ans, j’avais montré mes premiers autoportraits photographiques à des amies de mes parents. C’était des féministes intellectuelles avec de forts tempéraments. Elles n’y ont vu que du narcissisme. Je me suis donc refermée comme une huitre, bien convaincue qu’il y avait bien plus derrière un autoportrait qu’un simple problème d’ego et que le sujet restait à creuser.
J’ai donc fait mon petit bonhomme de chemin. Ne dévoilant mes autoportraits que lorsque c’était utile. Sont alors arrivés les réseaux sociaux. Et soudain, mes autoportraits photographiques, noyés dans les selfies, ne dénotaient plus. Ceci alors même que selon moi, le selfie des réseaux n’est qu’un vague cousin du self-portrait. Mais ça, c’est une autre histoire !
Who – Qui, quoi, pourquoi, comment ?
Je me souviens de ce premier autoportrait photographique que j’ai fait à la maternelle. Je ne me souviens pas véritablement des circonstances. Était-ce un atelier ? Avait-on développé et tiré les photographies ? Ou était-ce tout simplement la photo individuelle proposée par l’établissement ? Je ne sais pas.
En revanche, je me souviens exactement de la sensation physique et intellectuelle de cette prise de vue. Ce souvenir est certainement l’un des plus ancrée en moi. Probablement parce que je le sollicite à chaque déclenchement de l’appareil photographique.
Avec mon gilet en laine et mon pantalon en jean, j’étais positionnée dans un des buts du terrain de sport derrière l’école. Le photographe nous avait donné dans les mains le retardateur flexible. Et avait insisté sur le fait qu’il ne fallait pas bouger car au moment même où nous allions appuyer sur le retardateur, la photo serait prise. Ni avant, ni après, juste au moment de serrer cet étrange objet en caoutchouc !
Poser n’était pas un problème, je l’avais souvent fait pour mes parents. J’étais surtout obsédée par l’idée que pour une fois c’était moi le photographe. Comme d’habitude, j’étais le modèle. Mais pendant la fraction de seconde durant laquelle j’allais appuyer et que la photo allait être prise, je devenais le photographe. Puis, je redevenais le modèle. Lors de ces trois temps, j’étais tout à la fois photographe et modèle, devant et derrière l’objectif, ni devant et ni derrière l’appareil. J’avais le don d’ubiquité et tout entière (œil – corps – pensées) je devenais la photographie.
Pour obtenir cet instant de magie, je me suis lancée et j’ai appuyé.
Who – Qui j’aime ?
Durant une grande partie de mon adolescence, mon oncle m’a parlé des autoportraits de Rembrandt et d’un livre de Pascal Bonafoux dont c’est le sujet. Par le plus grand des hasards, l’un de mes premiers enseignants à Paris 8 fut Pascal Bonafoux. Celui-ci a consolidé mon goût pour l’autoportrait. Et depuis, j’ai toujours suivi la théorie selon laquelle l’autoportrait est le lieu idéal pour expérimenter un médium.
Contrairement à ce qui se produit lors de la réalisation d’un portrait, avec l’autoportrait l’artiste n’a pas besoin d’être complaisant vis-à-vis de son modèle. Le sujet de l’autoportrait n’est pas l’artiste mais le médium qu’il utilise. La photographie étant un médium avec de larges possibilités je me suis restreinte aux quelques paramètres qui m’intéressent le plus. Je vois la photographie comme la prise d’un instant. Je tranche l’image dans la réalité. Et le résultat photographique doit rester une surprise (ce qui oppose donc mes self-portraits aux selfies des réseaux sociaux). Dans mon travail, la photographie est principalement un jeu de hasard. Mon autoportrait photographique ne peut donc pas être retouché afin d’être amélioré après la prise de vues. Seuls font exceptions quelques rares séries comme La Ponctuation.
Depuis l’interview que j’ai faite lorsque j’avais 26 ans, mes goûts ont peu changés. Je suis toujours inspirée par les créations d’Elisabeth Vigée-Lebrun, Artemisia, Annie Ernaux, Cindy Sherman, Frida Kahlo, Claude Cahun, par « Orlando » et « Une chambre à soi » de Virginia Woolf, par les femmes fatales d’Helmut Newton ou les gravures de mode de Cecil Beaton, « La lumière des étoiles mortes » et les mondes miniatures de Charles Matton, « Peau d’Âne » de Jacques Demi, les premiers univers de Tim Burton, ceux de Pedro Almodovar, Peter Greenaway et David Lynch, ainsi que les films de Jean-Pierre Jeunet et Marc Caro.
En revanche, je suis moins attirée par le bizarre ou le dérangeant. Probablement parce que j’ai trouvé des réponses aux interrogations que je me posais à l’époque et que leurs motivations ne m’ont pas plu.
2001 – Paris 8 – Maîtrise d’arts plastiques.
Mémoire : « Pour une nouvelle bibliothèque des arts. »
2002 – Coréalisation, avec Renaud Roques de « La Chasse est ouverte »
2011 – Sorbonne – Master 2 Métiers de l’enseignement, de l’éducation et de la formation – Arts plastiques.
Mémoire : « Petites histoires, lieux d’auto-photographies. Autobiographie et fiction d’un autoportrait. »
2011 – Capes d’arts plastiques.